Cette chasse traditionnelle est régie par un quota de prises imposé par l’administration, quota dont le niveau ne cesse de diminuer en raison de la raréfaction de ce gibier frappé par la dégradation de l’environnement.
Plus de 400 000 en 1998, 120 000 pour la dernière campagne de chasse, le nombre maximum d’alouettes des champs pouvant être capturées à l’aide des pantes dans le département ne cesse de baisser d’année en année. En Gironde, comme dans les Landes, le Lot-et-Garonne, et les Pyrénées-Atlantiques, où cette chasse traditionnelle est régie par un quota de prises imposé par l’administration. Pourtant, les prélèvements réalisés dans les pantes girondines en période de migration et soumis à déclaration par les détenteurs d’autorisations à la Direction départementale des territoires et de la mer s’élèvent à 71077 pour 2015-2016.
On est donc loin du compte. En cause, la dégradation de l’environnement, du réchauffement climatique aux conditions d’accueil des alouettes, plus que la pression de chasse. Comme ses voisins, la Gironde tente de suivre les tendances d’évolution des populations nicheuses. Le département dispose ainsi de 21 circuits soit 105 points d’écoute. L’évolution sur plusieurs années de l’effectif des mâles chanteurs détectés autour de ces points révèle l’évolution réelle de l’effectif nicheur. Et en Gironde, il reste hélas très bas, indiquant le faible potentiel d’accueil pour la nidification de cet oiseau.
Fidèles aux pantes
Cela ne décourage pas les passionnés fidèles au poste. De nombreuses pratiques ont décliné ou ont été interdites depuis des décennies comme celle au magnétophone – certains, pris en flagrant délit et poursuivis pour braconnage peuvent en témoigner – ou celle au panneau. Dans un champ semé d’alouettes, le panneau tenu par les villageois rasait le sol d’un côté et faisait décoller les oiseaux dans ses filets de l’autre. La chasse à la matole est quant à elle encore autorisée pour l’alouette qui, en picorant la nourriture laissée à son attention sous la matole, déséquilibre la tige qui retient la cage et se retrouve prisonnière. Mais dans le Sud-ouest, et en particulier en Gironde, c’est l’utilisation des pantes qui domine. 1661 autorisations de chasse aux pantes ont été délivrées dans le département pour la saison 2015-2016 et autant pour 2016-2017. Il s’agit en fait de filets horizontaux disposés sur des sols aménagés. Ici plus qu’ailleurs la maîtrise de la technique est indispensable. Pour siffler l’oiseau afin de l’attirer, pour interpréter sa réaction et savoir « tirasser » pour déclencher le filet au bon moment.
Le premier « travail » consiste donc à préparer le terrain, à y placer les appeaux – des alouettes vivantes corsetées qui feront croire à leurs congénères que les lieux sont sûrs – à vérifier que les câbles n’ont pas bougé durant la nuit, puis à tendre les filets. Ensuite, comme souvent, c’est une affaire de patience. Une histoire de copains aussi. Depuis leurs abris de fortune, camouflés sous les herbes hautes et la brande, nichés aux coins des vignes et champs de terre, les amateurs scrutent inlassablement le ciel dans l’espoir de voir apparaître de petits points noirs qui, en s’approchant, se révéleront être des alouettes. Encore faut-il distinguer des autres oiseaux leur trajectoire de vol et leur chant caractéristique. Ce sont là des gestes de prises souvent transmis du grand-père au petit fils. Cela ne s’apprend pas dans les livres ou sur internet. Voir les alouettes tourner et papillonner autour de la pante, planer, les siffler, les poser, suffit souvent au bonheur du chasseur qui ne boude évidemment pas la capture. D’autant qu’il y a beaucoup de jour sans. « Ca ira mieux demain » est d’ailleurs la devise dans bien des cabanes.