Grand gibier : « les chasseurs font le job ! »

Les dégâts du grand gibier sur les cultures sont suivis à la loupe par les techniciens. De nombreux paramètres font varier la facture et la FDC33 cherche – et trouve – des solutions adaptées.

C’est la loi. Depuis 1968, l’indemnisation des dégâts causés par le grand gibier aux cultures et récoltes agricoles est à la charge des fédérations départementales des chasseurs. « C’est la contrepartie de la suppression du droit d’affût, c’est-à-dire de la possibilité donnée aux exploitants de chasser librement le grand gibier pénétrant sur leurs parcelles », explique Nicolas Savary, directeur juridique et du service dégâts à la FDC 33. Les dégradations commises dans les bois font quant à elles l’objet de discussions dans le cadre de la commission régionale de la forêt et du bois.

Tout est codifié. Un exploitant agricole victime du passage de sangliers, cerfs ou chevreuils doit faire une déclaration de dégâts et apporter le maximum d’éléments à son dossier. Plusieurs facteurs comme la période de semi qui joue sur la disponibilité alimentaire, la durée de récoltes, le nombre de cultures dérobées, etc. entrent en ligne de compte. « Une expertise technique a lieu, un prix de la denrée endommagée est arrêté en commission départementale et la fédération des chasseurs fait une proposition de montant », poursuit Nicolas Savary. « Dans le département, les dégâts sont contenus et maîtrisés et les prélèvements sont satisfaisants. Les chasseurs font le job. Ils rendent service à la collectivité tout en vivant leur passion. Mais, du fait du prix de la denrée, un seul sanglier dans une pépinière peut faire plus de dégâts qu’une harde dans un champ de maïs ». Les chasseurs tentent donc de prévenir les dégâts, notamment grâce à l’agrainage de dissuasion ou la mise  en place de dispositifs de type clôture électrique. « Nous essayons également de favoriser d’autres modes de chasse comme l’affût ou l’approche, plus adaptés par exemple à un milieu périurbain ».

En chiffres :
Dans le département le plus grand de France métropolitaine, le montant des dommages apparaît contenu. « Sur la campagne 2016-2017, le montant des dégâts dans le département s’élève à 199 257,28 € », révèle Nicolas Savary, du service dégâts de gibier. 120 000 euros concernent les grandes cultures, 18 000 euros les vignes, 15 000 les prairies et 44 000 les productions à haute valeur ajoutée, comme les semences biologiques ou légumières notamment. « Même si les quantités détruites sont peu importantes, compte-tenu du coût de ces productions, cela fait vite grimper la facture », explique le technicien. « 72% de la facture sont imputables aux sangliers, 15% au cerf et 8% au chevreuil. Hors destruction, les prélèvements s’élèvent pour 2016-2017 à 11 689 sangliers, 12284 chevreuils et 1449 cerfs. 102 exploitants ou exploitations agricoles ont été indemnisés. Le montant des dégâts devrait se chiffrer à 184 000 euros pour 2017-2018 ».

La bête noire ?

Les prélèvements, la pression de chasse, les dégâts : tous les chiffres à connaître sur le sanglier en Gironde

Les prélèvements de sanglier ont été multipliés par trois en vingt ans dans l’Hexagone et par 6 en 25 ans. La Gironde n’échappe pas à cette tendance. Le tableau de chasse s’élève à plus de 12 000 sangliers la saison dernière au fil de plus de 10 000 battues. Pour la saison 2015 2016, 9351 animaux avaient été prélevés dont 724 au cours du mois de mars en période de destruction. Le nombre de sanglier tué par battue était alors de 0,96. La moitié du tableau de chasse est réalisé entre fin novembre et début décembre. Chassable dès le 1er juin dans les territoires à dégâts, le sanglier reste un gibier prisé puisqu’un chasseur girondin sur deux s’adonne à sa chasse. Recette importante pour la vie de la fédération et variable dans le calcul de la facture des dégâts, le timbre sanglier est fixé à 13 euros. Et le sanglier demeure le responsable majeur, à 70% dans les céréales et à 30% dans les vignes à cause des jeunes plants qu’il arrache, des dégâts aux récoltes. Le budget alloué aux dégâts est de 600 000 euros. On reste loin des départements de l’Est de la France où ce montant avoisine les 2 millions d’euros. L’enveloppe englobe les dégâts aux cultures, mais aussi l’agrainage, le matériel de protection des semis et le salaire du personnel à plein temps sur ce dossier.

À L’AFFÛT…

Dans son catalogue de formations, dont une bonne part concerne la chasse au grand gibier, la fédération des chasseurs de la Gironde a ajouté une session pour la chasse à l’affût.

Une douzaine de formations est désormais proposée par la fédération des chasseurs de la Gironde en direction de ses adhérents. Réunies tous les ans dans un catalogue, elles vont de la chasse à l’arc à la sécurité dans les palombières en passant par la régulation à tir des corvidés ou le piégeage. Plusieurs concernent la chasse au grand gibier, comme celle organisée autour de l’hygiène de la venaison, vivement conseillée depuis la règlementation qui impose un examen initial du gibier sauvage comme précaution sanitaire. Ou celle autour de la sécurité en battue. Depuis la mise en place de cette dernière, près de 7000 chasseurs ont été formés en Gironde. Dernière arrivée, une formation autour de la chasse à l’affût et à l’approche pour répondre aux attentes autour de ce mode de chasse de plus en plus prisé et véritable outil pour la gestion de certaines zones, notamment périurbaines.

  • Catalogue à demander au 05 57 88 57 00.

L’appel de la forêt entendu

La FDC33 a renouvelé ses sorties au brame réunissant chasseurs, non chasseurs, curieux, sylviculteurs. Un vrai succès !

De plus en plus de curieux se pressent en forêt pour écouter les amours automnales du cerf. À tel point que de nombreux maires sont obligés de prendre des arrêtés interdisant la circulation sur les chemins forestiers en période de brame pour ne pas perturber le cycle hormonal du cerf. La FDC 33 a, cette année encore, organisé des soirées d’écoute des cerfs au brame dans le massif médocain. 180 personnes ont été accueillies au fil de trois soirées. Ouvertes à tous, gratuites, elles accueillent jeunes et moins jeunes, chasseurs ou non, qui, à partir de points d’écoute répartis de façon homogène dans la forêt, sont invités à noter, quart d’heure par quart d’heure, le nombre de cerfs bramant entendus et leur direction. Des données précieuses pour les techniciens et le sentiment d’être encore davantage au contact de la nature. Ces soirées sont aussi des instants de partage bien compris entre forestiers, propriétaires, grand public et chasseurs pour une meilleure connaissance du rôle de chacun.

Nouveaux chasseurs : sur la piste des alouettes

Cette chasse traditionnelle est régie par un quota de prises imposé par l’administration, quota dont le niveau ne cesse de diminuer en raison de la raréfaction de ce gibier frappé par la dégradation de l’environnement.

Plus de 400 000 en 1998, 120 000 pour la dernière campagne de chasse, le nombre maximum d’alouettes des champs pouvant être capturées à l’aide des pantes dans le département ne cesse de baisser d’année en année. En Gironde, comme dans les Landes, le Lot-et-Garonne, et les Pyrénées-Atlantiques, où cette chasse traditionnelle est régie par un quota de prises imposé par l’administration. Pourtant, les prélèvements réalisés dans les pantes girondines en période de migration et soumis à déclaration par les détenteurs d’autorisations à la Direction départementale des territoires et de la mer s’élèvent à 71077 pour 2015-2016.

On est donc loin du compte. En cause, la dégradation de l’environnement, du réchauffement climatique aux conditions d’accueil des alouettes, plus que la pression de chasse. Comme ses voisins, la Gironde tente de suivre les tendances d’évolution des populations nicheuses. Le département dispose ainsi de 21 circuits soit 105 points d’écoute. L’évolution sur plusieurs années de l’effectif des mâles chanteurs détectés autour de ces points révèle l’évolution réelle de l’effectif nicheur. Et en Gironde, il reste hélas très bas, indiquant le faible potentiel d’accueil pour la nidification de cet oiseau.

Fidèles aux pantes
Cela ne décourage pas les passionnés fidèles au poste. De nombreuses pratiques ont décliné ou ont été interdites depuis des décennies comme celle au magnétophone – certains, pris en flagrant délit et poursuivis pour braconnage peuvent en témoigner – ou celle au panneau. Dans un champ semé d’alouettes, le panneau tenu par les villageois rasait le sol d’un côté et faisait décoller les oiseaux dans ses filets de l’autre. La chasse à la matole est quant à elle encore autorisée pour l’alouette qui, en picorant la nourriture laissée à son attention sous la matole, déséquilibre la tige qui retient la cage et se retrouve prisonnière. Mais dans le Sud-ouest, et en particulier en Gironde, c’est l’utilisation des pantes qui domine. 1661 autorisations de chasse aux pantes ont été délivrées dans le département pour la saison 2015-2016 et autant pour 2016-2017. Il s’agit en fait de filets horizontaux disposés sur des sols aménagés. Ici plus qu’ailleurs la maîtrise de la technique est indispensable. Pour siffler l’oiseau afin de l’attirer, pour interpréter sa réaction et savoir « tirasser » pour déclencher le filet au bon moment.

Le premier « travail » consiste donc à préparer le terrain, à y placer les appeaux – des alouettes vivantes corsetées qui feront croire à leurs congénères que les lieux sont sûrs – à vérifier que les câbles n’ont pas bougé durant la nuit, puis à tendre les filets. Ensuite, comme souvent, c’est une affaire de patience. Une histoire de copains aussi. Depuis leurs abris de fortune, camouflés sous les herbes hautes et la brande, nichés aux coins des vignes et champs de terre, les amateurs scrutent inlassablement le ciel dans l’espoir de voir apparaître de petits points noirs qui, en s’approchant, se révéleront être des alouettes. Encore faut-il distinguer des autres oiseaux leur trajectoire de vol et leur chant caractéristique. Ce sont là des gestes de prises souvent transmis du grand-père au petit fils. Cela ne s’apprend pas dans les livres ou sur internet. Voir les alouettes tourner et papillonner autour de la pante, planer, les siffler, les poser, suffit souvent au bonheur du chasseur qui ne boude évidemment pas la capture. D’autant qu’il y a beaucoup de jour sans. « Ca ira mieux demain » est d’ailleurs la devise dans bien des cabanes.

Etat des lieux du gibier avant l’ouverture

Valider son permis en Gironde, c’est avoir accès à divers modes de chasse et gibier. Le sanglier reste la bête noire, mais la population de cerfs et chevreuil est maîtrisée avec des plans de chasse respectifs de 14 000 et 2 000.

Loin de représenter la corvée de la battue, ce gibier connaît un regain d’intérêt de la part des chasseurs à l’approche ou à l’arc. Pour les oiseaux, le faisan reste le gibier d’ouverture. Beaucoup de lâchers mais aussi des efforts consentis sur les pré-lâchers, les volières, une harmonisation dans les règlements locaux. La perdrix est revenue dans l’Entre-deux-Mers. Le lièvre s’épanouit dans les vignes, de plus en plus enherbées et fait l’objet d’attentions. Les chasseurs girondins sont dans l’ère de la gestion. Et dans ce paradis pour le gibier migrateur, il n’y a jamais eu autant de palombes et la dernière saison du gibier d’eau a été excellente. Il faut dire que la priorité des chasseurs a changé. Le tableau importe désormais moins que le plaisir pris à chasser.

Réglementation : formation obligatoire

Chasser à l’arc est tout sauf un jeu. La pratique est accessible à tous à condition de suivre une journée d’initiation pour obtenir un certificat de capacité.

La chasse à l’arc n’a été légalisée qu’en 1995. L’arc était tombé en désuétude par rapport aux armes à feu. C’est certes devenu un objet ludique et sportif mais c’est oublier que ce fut d’abord une arme de chasse, puis une arme de guerre jetée aux oubliettes avec l’arrivée des armes à feu. Il a donc fallu faire pression sur les autorités de tutelle pour que la chasse à l’arc soit reconnue comme pratique. Et légitimée. Car beaucoup prenaient cette façon de faire ancestrale pour du braconnage. D’autres réduisaient ses praticiens à de grands enfants un peu excentriques qui jouent aux indiens avec arc et carquois. « Or c’est tout sauf un jeu », rappelle la FDC33.

Et aligner les coupes de tireur émérite en club ne fait pas nécessairement un bon chasseur à l’arc. La pratique est accessible à tous à condition d’être détenteur du permis de chasser et de suivre une journée d’initiation pour obtenir un certificat de capacité. Cette formation est gratuite et dispensée par la FDC avec le concours des représentants de l’Union des chasseurs à l’arc de Gironde. Elle a pour but d’appréhender la pratique sous toutes ses facettes (matériel, législation, espèces animales, recherches au sang, sécurité, tir à l’arc).

Renseignements au 05 57 88 57 00.

Gibier d’eau : ouverture à tiroirs

Les dates d’ouverture de la chasse au gibier d’eau font tous les ans l’objet de discussion et doléances. Malgré des tentatives d’harmonisation régionale, il reste des spécificités.

« Pas de grande incertitude en Gironde cette année », a résumé Jean-Francis Séguy, le président du groupement des associations de sauvaginiers de Gironde. Ce sera à nouveau une ouverture anticipée en ordre dispersé. Pour le domaine public maritime et fluvial ce sera le premier samedi d’août à 6 heures. Pour les quatre anciens cantons dits « historiques » de Saint-Ciers-sur-Gironde, Blaye, Saint-Vivien-de-Médoc et Lesparre, ce sera le premier jour de la deuxième décade d’août. Un jour en semaine donc, souvent contesté. Pour les marais intérieurs ce sera le premier jour de la troisième décade. Chaque saison, les chasseurs de l’intérieur se sentent exclus par cette non harmonisation des dates d’ouverture. Pour la fermeture, fixée au 31 janvier, les sauvaginiers ne désespèrent pas obtenir gain de cause pour chasser jusque mi-février.