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Quand le ramier passe à table

Le 25 juin 2020, une publication scientifique est parue dans la Revue internationale Journal of Animal Physiology and Animal Nutrition. Les auteur-e-s, Coralie NEGRIER, Marco FANTINATI, Faouzi LYAZRHI, Valérie COHOU et Nathalier PRIUMENKO, lèvent le voile sur les habitudes alimentaires du pigeon ramier. À table !

Pour mener cette étude, le Groupe d’Investigations sur la Faune Sauvage, les techniciens des FDC de Nouvelle-Aquitaine et de Midi-Pyrénées ont récolté les échantillons et travaillé en étroite collaboration avec l’École vétérinaire de Toulouse. Les nouvelles politiques agricoles et directives européennes ont profondément transformé les pratiques culturales. À terme, certaines de ces transformations pourraient affecter la disponibilité alimentaire pour des populations d’oiseaux et mettre ainsi en péril la biodiversité. Cette étude vise à évaluer les conséquences de telles transformations agricoles en France sur le régime alimentaire du pigeon ramier.

Ce sont en tout 1 093 pigeons ramiers qui ont été prélevés sur une période de trois ans (2014-2017). L’échantillonnage volontaire a été réalisé dans six régions biogéographiques du Sud-Ouest de la France par des chasseurs locaux au cours de la migration automnale de cette espèce et au cours de l’hivernage. Des contenus de jabots ont été récupérés, identifiés au niveau macroscopique et microscopique, puis pesés avant et après séchage.

Un régime opportuniste
Cinq groupes alimentaires ont été identifiés : glands, maïs, végétaux, graines cultivées et autres. Des tests statistiques (ANOVA, test de Tukey) ont été réalisés en vue de comparaisons multiples. Le seuil de signification a été fixé à une valeur p inférieure à 0,05. Au total, 762 pigeons ramiers répondaient aux critères de l’étude. Le poids moyen de l’ensemble des contenus de jabots était inférieur à 9 grammes de matière sèche. Les groupes alimentaires les plus fréquents étaient les végétaux (70,3%), les glands (42,3%) et le maïs (27,2%). En poids de matière sèche, l’aliment le plus présent dans les contenus des jabots était les glands (62%) : ceux-ci étaient consommés plutôt au cours des deux premières saisons de chasse (p < 0,001), et, dans la région des « Pays de l’Adour », les niveaux de consommation étaient plus bas que dans toutes les autres régions.

Manger « local »
À l’inverse, la consommation de maïs a atteint son sommet au cours de la troisième année (p < 0,001) et dans la région des « Pays de l’Adour » les oiseaux consommaient cette céréale de façon croissante. Les graines cultivées contribuaient le plus au régime pendant la migration (p < 0,007), tandis que les légumes et autres étaient plutôt consommés pendant l’hivernage (p = 0,011 ; p = 0,004).

En conclusion, les résultats confirment la nature opportuniste du pigeon ramier, qui équilibre son régime selon la disponibilité alimentaire. Le maïs était consommé en plus grande quantité dans les zones où l’enfouissement hivernal des résidus de maïs, normalement imposés par la directive Nitrate, faisait l’objet d’une dérogation.

Cette étude est extraite de la thèse vétérinaire de Coralie Négrier – Ecole nationale vétérinaire de Toulouse.