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Dégâts de chevreuil sur vigne: pas de remède miracle

Les départements viticoles le savent et le redoutent, les cervidés, et tout particulièrement les chevreuils, adorent les bourgeons et les jeunes feuilles de vigne. L’indemnisation des viticulteurs est ruineuse pour les finances des fédérations. Celle de Charente-Maritime organisait, début août, une réunion d’information et de présentation des moyens mis en œuvre depuis dix ans pour lutter contre ces attaques.

Un département avec de belles populations de chevreuils et une viticulture en expansion. 4 624 attributions en 2009, 7 418 en 2019, les chiffres parlent d’eux-mêmes, le chevreuil est chez lui en Charente-Maritime. Le plan de chasse qualitatif a produit son effet : les populations se portent bien et les taux de réalisation sont satisfaisants. Parallèlement, après la grande crise des années 90, la viticulture a repris de la vigueur. 1 725 exploitations produisent la moitié des volumes de vins blancs destinés à l’élaboration du Cognac. 36 000 hectares de vignes dans le département ! Et l’on replante. 3 500 hectares en 2019. Chaque hectare de vigne adulte a un potentiel de production de 12 650 €. Ces derniers chiffres sonnent le tocsin pour les finances fédérales : 19 dossiers d’indemnisation vignes en 2017-2018. 27 000 euros pour 2 hectares seulement, en trois dossiers ! Attention danger !

Dix années d’expérimentation
L’homme du jour de cette réunion, très au fait de tous ces éléments, c’est Régis Dumont, viticulteur à La Genétouse, commune de l’Est du département. Il présentait, en toute modestie, les résultats d’une décennie d’observations sur son vignoble et sur des parcelles de viticulteurs amis. Dans l’assistance, des chasseurs, des viticulteurs chasseurs ou pas, et des représentants de deux fédérations voisines, la Charente et la Dordogne, départements viticoles à fort potentiel, donc à risque de dégâts onéreux. Régis Dumont le rappelle plusieurs fois : il a mis en place des sites d’observation, plutôt que des essais. Les résultats constatés doivent l’être dans des conditions identiques de parcellaire, d’époque, de météo, de traitement. Et la prudence est de mise dans l’analyse et les déductions.

De l’observation…
En traitement préventif, de 2009 à 2014 ont été pulvérisés du soufre (au maximum de la dose autorisée) du lait entier dilué, de l’huile de poisson. Outre les difficultés techniques, ce fut un échec. 2014 à 2018, en préventif et curatif, diffusion d’un produit autrichien, le Trico, efficace, sauf en 2016 associé au soufre, et difficile à appliquer. 2017, emploi d’un nouveau produit à base de concentré de piment, le PNF 19. Résultats médiocres voire mauvais. La version suivante, le PNF 22-10, elle, donne de bons résultats en 2018. À confirmer. On arrive en 2019, avec 19 sites d’observation mis en place : pour traitements préventifs, curatifs, avec ou sans clôture et parcelles témoin. Gros travail. Les résultats, en préventif sont, moitié excellents, moitié mauvais ! En curatif, de 48 % à 100 % inefficaces ! On y perd son latin et son temps. La déception est grande.

… à la prudente conclusion
Ce dont on est sûr, c’est que la majorité des dégâts, causés avant le débourrage de la vigne, sont extrêmement difficiles à prévenir. Que les attaques peuvent se produire simultanément sur des parcelles éloignées les unes des autres, mais pas côte à côte ! Que la clôture électrique à plusieurs fils est efficace. Qu’il n’y a pas de produit miracle, en préventif ni curatif. Enfin, les vignes enclavées ou en bord de forêt courent beaucoup plus de risque que les autres. On s’en doutait un peu… Donc, il conviendrait peut-être de tirer en février les animaux présents régulièrement dans les vignes. On sait qu’ils sont peu nombreux. Et pourquoi pas à l’approche ? On peut aussi envisager de mettre en place un protocole de prélèvement, à titre expérimental, sur un territoire très touché. On peut rechercher d’autres répulsifs. Bref, la Fédération et les viticulteurs sont à l’écoute de toutes les suggestions.

Christine De Ponchalon